|
Mes mathématiciens préférés
Celui que j'admire le plus :
Alexandre Grothendieck (1928,...)
Sa biographie :
Il est né en 1928 en
Allemagne d'une mère allemande et d'un père
russe. Son père qui était "légèrement"
révolutionnaire participa à toutes les révolutions
européenne de 1900 à 1930 (1905 et 1917 en
Russie par exemple, mais il en fit de nombreuses autres
à travers l'Europe). Il ne faisait pas être
bon être enfant d'un communiste, qui plus est russe,
dans l'Allemagne des années 30. Après la nuit
de Cristal, sa mère décida de l'envoyer en
France. Depuis cette date, il ne revit plus sa mère
ni son père (qui fut vraisemblablement assassiné
par les nazis).
Il est remarqué par
un inspecteur général qui décide de
financer toutes ses études. Il fait ses études
supérieures à Montpellier puis il devint auditeur
libre à l'ENS ULM et il décide de faire une
thèse. Il ne savait pas s'il devait la faire en analyse
fonctionnelle, en probabilité, en analyse harmonique,
et bien d'autres théories. On lui conseille d'aller
à Nancy, où se trouvait à l'époque
les plus grands mathématiciens français (http://www.les-mathematiques.net/histoire/histoire_schw.php3).
Il rencontre Schwartz et Dieudonné (qui était
à l'époque les meilleurs spécialistes
de l'analyse fonctionnelle) et il leurs expose ces envies
: l'une d'entre elles est de développer les probabilités
d'un groupe topologique à valeur dans un espace vectoriel
topologique ( sans hypothèse supplémentaire
!!!). Dieudonné fut effrayé par une telle
généralité. Grothendieck leurs déclare
avoir résolu plusieurs problèmes que Schwartz
et Dieudonné n'avaient pu résoudre dans de
précédents articles en commun. Grothendieck
étant à cette époque quelque peu arrogant
et sûr de son intelligence, Dieudonné prit
la mouche et son caractère soupe au lait assez développé,
il déclare à Grothendieck que les vieux problèmes
ne les intéressaient pas et que seuls les problèmes
actuels avaient une valeur à leurs yeux. Dieudonné
et Swchartz lui proposent alors une série de 14 problèmes
qu'ils n'avaient pu résoudre dans des articles récents
et lui déclarent que s'il arrive à résoudre
l'un de ces problèmes, il obtiendrait sa thèse
de doctorat d'Etat. Trois mois passèrent et Grothendieck
leur amena les solutions à 7 problèmes ! Sa
thèse ne fait "que" 800 pages (le standard
en mathématiques est d'une centaine de pages) et
elle deviendra l'un des grands classiques de l'analyse fonctionnelle
(en particulier, le théorème des noyaux de
Schwartz n'était qu'un cas particulier de sa théorie
: les espaces nucléaires). Dieudonné dit de
cette thèse que l'on pouvait la couper en 7 parties,
chacune faisant une très bonne thèse d'Etat
(arf, ne peut-il pas en passer à 6 autres thésards
qui rament)
Il décida ensuite de
poursuivre en analyse fonctionnelle. Sa capacité
d'abstraction l'amena petit à petit vers les théories
cohomologiques puis vers la géométrie algébrique
(en une dizaine d'années). André Weil introduit
vers la fin des années 50 ses célèbres
conjectures sur l'hypothèse de Riemann sur les corps
finis. Grothendieck est passionné par ces conjectures
et décide de les démontrer. Pour cela, il
décide de refonder la géométrie algébrique.
A la fin des années 1950, un mécène
privé, Léon Motchane, dont l'ambition est
de créer un institut à la mesure de Grothendieck
et dont l'objectif est de developpé de la recherche
de très haut niveau, fonde l'Institut des Hautes
Etudes Scientifiques (IHES) et Grothendieck y est bien entendu
engagé (http://www.ihes.fr/IHES/Presentation/Historique/ancien.html).
Traditionnellement, la géométrie
algébrique est l'étude des variétés
C^n (ou k^n avec k algébriquement de caractéristique
nulle) qui sont des ensembles définis comme étant
les zéros dans C^n d'un nombre fini d'équations
polynomiales (par exemple, le cercle usuel qui est défini
par x^2+y^2=1 est une variété algébrique
sur R, le groupe SO(2,C) est une variété algébrique
sur Cdéfinie par 4 équations polynômiales).
Zariski et surtout Serre ont pu développer une géométrie
sur les corps non algébriquement clos. Par contre,
ils ne pouvaient travailler sur l'ensemble {(x,y,z) dans
Z tels que x^3+y^3=z^3} qui est une "variété
algébrique sur Z" et Z n'est pas un corps !
Grothendieck ne propose rien
de moins que de généraliser la géométrie
algébrique aux anneaux commutatifs et pour pouvoir
travailler avec les tangentes (espaces tangents), il n'exige
pas que l'anneau soit intègre. Ainsi Grothendieck
remplace C par un anneau commutatif pouvant posséder
des éléments nilpotents (la seule condition
est d'avoir un élément unité), ce qui
rendre la théorie extraordinairement abstraite et
dont le nom est la théorie des schémas. En
moins de 10 ans (1960-1970) Grothendieck va, à lui
tout seul, changer définitivement le visage de la
géométrie algébrique (l'analogue du
passage de l'étude des équations par les méthodes
algébriques du 16ème siècle à
l'introduction du calcul infinitésimal du 17ème).
Une annecdocte savoureuse :
Oscar Zariski, l'un des maîtres de la géométrie
algébrique de la première moitié du
20 ème siècle, répondait aux élèves
qui souhaitaient apprendre la géométrie algébrique
d'aller plutôt à Paris pour l'apprendre avec
Grothendieck car il n'avait plus rien à leur apprendre
face au travail de titan de Grothendieck. Il a fait de l'IHES
le centre mondial de la géométrie algébrique
et le monde entier venait y faire ses gammes (américains,
anglais, italiens, etc) auprès du maître. En
parallèle de ce travail, il décida d'écrire
(avec l'aide de Dieudonné), en simultanné
de ses découvertes, un livre où il développait
sa théorie : il s'agit des Eléments de Géométrie
Algébrique (EGA). Ce livre est en une bonne dizaine
de tomes, chacun faisant 700, 800 pages bien dense. Il faut
avoir, une fois au moins, entre les mains ce monument pour
ce rendre compte du travail et de la puissance; un frisson
vous parcourt le corps, l'âme. Il dirige également
un séminaire : Séminaire de Géométrie
Algébrique (SGA) qui sont rédigés également
( 8 tomes). Sa théorie va lui permettre de démontrer
deux des trois conjectures de Weil qui lui vaudront la médaille
Fields en 1966 (http://www.ihes.fr/IHES/Presentation/Historique/fields.html).
La troisième conjecture sera prouvée par son élève
Pierre Deligne au début des années 1970.
Comme nous l'avons dit, en une
décennie il a construit un nouveau monde, d'une abstraction
et d'une profondeur sans précédent. En parallèle,
il a sous son aile une floppée de thésards
(jusqu'à 10 en même temps!) et je vous laisse lire un témoignage
éloquent d'un ancien élève
(qui fut directeur de l'ENS Lyon (www.ens-lyon.fr/JME/Vol1Num1/artEDumas/artEDumas.html)
Mai 1968 vient de passer, cela
fait 30 ans qu'il travaille sans relache son amour des mathématiques
et il se retourne sur son passé : il n'a jamais revu
sa mère, son père est mort, en raison de la
guerre et de la barbarie nazie, son Institut est financé
par l'OTAN (en raison de difficultés financières
passagères, cf. La recherche 62 http://www.larecherche.fr/special/idx/index70-75-numeros.html,
http://netmc.9online.fr/Curiosa/Grothendieck10.html).
Qu' a-t-il fait de sa vie à part des maths ? Il a
à peine 40 ans et il décide de tout arrêter.
Il se lance dans l'Ecologie (20 ans avant tout le monde),
il fonde sa communauté ("baba cool"), crée
et publie la revue Survivre, milite contre la guerre du
Vietnam mené par les Américains (il va jusqu'au
Vietnam pour manifester sous les bombes; notre passif avec les Américains
se creuse déjà :- ) ). Il ne veut plus rencontrer
son ancien monde (ses amis mathématiciens, etc) et
retourne dans son université de formation : Montpellier,
où il sera professeur jusqu'à sa retraite
(en 1990 environ). Il refuse le prix Crawford en 1988 http://www.lacitoyennete.com/magazine/retro/grothendiecka.php)
arguant qu'il a déjà obtenu tous les honneurs
et qu'il est préférable de le decerner à
un jeune mathématicien. Il publie également
un ouvrage au milieu des années 80 : "Récoltes
et Semailles" qui fera grand bruit : c'est un mélange
de considérations personnelles et mathématiques
(http://herreman.free.fr/Decouvrir-Transmettre.pdf)
Grothendieck est un monument
: il a cotoyé dans sa chair les moments les plus
sombres du siècle précédent, il a atteint
les sommets mathématiques et il a pu arrêter
tout, par conscience. C'est un mathématicien romantique.
Pour comprendre l'impact de Grothendieck sur le monde mathématique, il suffit de voir le colloque en son honneur en 1988 (Grothendieck Festschrift ). Bien qu'il ait quitté le monde mathématique académique et officiel depuis 1970, presque 20 ans plus tard, le gratin mondial des mathématiques lui rend un hommage exceptionnel (il suffit de compter le nombre de Médaillés Fields présents !!) , le tout en 3 tomes bien épais chez le très prestigieux Birkhaüser
Le prince des mathématiciens
: Karl Friedrich Gauss (1777-1855)
Un autre mathématicein
romantique : Niels Henrik Abel (1802-1828)
Celui qui m'a donné la
passion des sciences Géo Trouvetou
(..,..)
|